lundi 3 janvier 2011

1. le blog

La journée avait été longue. Je tournais la clé dans la porte, jetais mon sac à main et mon manteau sur le canapé, et m’affalais dedans pour découvrir mes achats. Je sortais avec délices une robe-pull bleue marine, en laine toute douce de son sac et examinait les collants en dentelle que j’avais acheté pour les porter avec. Une écharpe de soie crème au motif de fleurs couleur chocolat complèterait magnifiquement la tenue. Je soupirais, enlevais les étiquettes de mes achats et enfoui les tickets de caisse au fond des sacs que je roulais tous en boule dans un coin d’un placard.

Lily, le chaton noir aux yeux vert – ma petite panthère - qui était entré dans ma vie quelques jours plus tôt s’éveilla de son lourd sommeil et vint vers moi en poussant des miaulements aigus, comme pour me reprocher de ne pas l’avoir réveillée à mon arrivée. Encore trop petite pour sauter sur le canapé, elle se fit un devoir d’escalader la jambe de mon pantalon noir, puis s’installa au creux de mon cou en ronronnant de bonheur.

Mon estomac gargouilla, quelques heures plus tôt, j’avais passé un entretien, et comme pour les quelques entretiens que j’avais pu passer ces derniers mois, je savais que je ne donnerais pas suite. Le job pourrait être intéressant, s’il ne cachait pas une forte dose de sale boulot et un salaire plus que minable. Sans compter que le job pour lequel j’avais passé un entretien ce matin aurait réclamé que j’achète une voiture étant donné l’endroit assez peu accessible où il était situé, et je n’en avais actuellement pas les moyens.

Evidemment, face à cette déconvenue, j’avais soudain eu une folle envie de shopping et je n’avais pas pu résister à cette jolie robe au moment où je l’avais vue dans la vitrine. Et comme toujours depuis quelques mois, mon incursion au centre ville avait été une course rapide, sans prendre le temps de m’intéresser à la ville, à ses salons de thé ou autre. Se balader ou pire, s’installer dans un salon de thé, seule, était quelque chose que je n’arrivais pas à me contraindre de faire. Je concevais cela comme le comble du triste.

Je soupirais. Un dernier entretien. Une nouvelle déception.

J’avais déménagé depuis plusieurs mois maintenant en province. Ex-parisienne repentie, j’avais tout lâché, y compris mon job, pour quitter Paris. Ras-le-bol de cette vie ultra-pressée ou on prenait tout juste le temps de réellement vivre, ras-le-bol de ce ciel gris, des gens moroses. Grignoter le matin un petit déjeuner rapide avant de courir jusqu’au métro en espérant avoir une rame pas trop bondée, de préférence entourée de gens qui auraient pris une douche avant de se lancer à l’assaut d’une journée. Me rendre au boulot, déjeuner sur le pouce d’un sandwich ou d’une salade achetée rapidement chez le traiteur du coin, rentrer chez moi sous la pluie, après quarante minutes environ de métro supplémentaire. Eventuellement, si je n’étais pas trop crevée, prendre une douche, me changer, aller boire un verre avec des amis puis rentrer – de préférence en se faisant raccompagner – et dormir. Les jours se suivaient et s’enchaînaient sur la même trame, supprimant le plus souvent le verre avec les amis, car trop fatiguée pour le faire.

Sans compter l’enchainement de petits amis rencontrés dans les bars, soirées after-work ou boites de nuit. Très souvent des histoires sans lendemain ou très peu, qui se terminaient en queue de poissons par un « c’est pas toi, c’est moi… », des larmes et une soirée entre filles ou on finissaient ivres à raconter les pires horreurs sur les mecs et combien on avait pas besoin d’eux, suivie d’une journée à pleurer toutes les larmes de mon corps.

J’avais grandi dans la proche banlieue parisienne, fait mes études à Paris, commencer à travailler là-bas, et puis, après des vacances dans le sud, j’avais décidé que je n’en pouvais plus de cette vie !

J’avais tout lâché, et décidé – malgré l’incompréhension générale de mes amis, parisiens de pure souche pour la plupart – de m’exiler dans le sud. Le sud où il faisait bon vivre, ou le climat et les gens étaient plus généreux, où l’on ne perdait pas deux heures de sa vie chaque jours dans les transports, où les loyers étaient plus abordables, etc… Mais, malheureusement pour moi, ou les emplois se faisaient aussi plus difficiles d’accès.

Et malgré tout je m’entêtais, j’espérais de tout mon cœur ne pas m’être trompée, ne pas avoir à retourner à la vie Parisienne.

J’allumais mon ordinateur portable et profitais des ronronnements de Lily en attendant qu’il s’allume. Il me restait à passer l’après-midi. J’avais passé toute la journée de la veille en recherche d’emploi, je n’avais pas envie de regarder une série pour l’instant, me restait internet.

Je posais le portable sur mes genoux, en prenant soin de ne pas déranger la boule de poils qui restait installée dans le creux de mon cou et ouvris une page internet. Pas de nouveaux mails – cela équivalait à pas de réponses aux CV envoyés. Je passais de page en page dans mes favoris pour voir les nouveautés et m’arrêtais sur un des blogs beauté que je fréquentais depuis quelques temps.

Aujourd’hui, pour l’entretien, j’avais fais un effort, mais après presque un an de recherche infructueuse, une petite dépression s’emparait de moi, et moi la parisienne stylée, ne faisait plus beaucoup d’efforts pour être présentable. Les blogs beauté me rappelaient cruellement cela. Encore que, si j’avais toujours fais attention à mon image, usant de fond de teint et mascara comme beaucoup de jeunes femme, je n’étais pas aussi expertes que les jeunes femmes que je voyais sur ces blogs. Elles parlaient de marques que je ne connaissais pas ou peu, de maquillage au pinceau – j’avais toujours utilisé mes doigts, à part, peut-être pour le blush, mais j’en portais si peu - de cent sortes de démaquillants. Je l’avoue, depuis que je lisais ces blogs, je m’étais laissée tenter par certains produits.

Un demi-heure plus tard, j’avais fais le tour de mes sites quotidiens, et je m’ennuyais. Je tournais en rond une ou deux fois dans l’appartement, pris un livre et le reposais, et décidais de faire un peu de rangement dans la salle de bain.
Je vidais le placard et retombais sur tout un tas de vieux produits, ma crème Dove devait bien avoir trois ans, je jetais le pot – saviez-vous qu’il y a une date limite sur tous ces produits ? – et me promis d’aller m’acheter une vraie crème adaptée à ma peau le lendemain. Et puis tout en étalant fards et rouges à lèvres devant moi, une idée germait dans mon esprit. Je n’avais ni produits MAC, ni Make Up For Ever – MUFE pour les intimes – encore moins une base Urban Decay, seulement des produits Bourjois, Maybelline, de petites choses que j’avais collectionné pendant ma vie d’étudiante, mais qui, finalement ferait sans doute une bonne base de départ. Je vidais les produits périmés ou séchés dans la poubelle, puis allait chercher quelques boites, quelques verres pour ranger soigneusement le reste des produits. Je re-découvris ainsi une pochette contenant des petits pinceaux Sephora – que j’avais sans doute eu en cadeau un jour – et les posait également dans un pot. J’étalais le tout et sourit. Et pourquoi pas ?

J’avais besoin de ce challenge fou, d’une motivation, de quelque chose qui m’oblige à me lever tous les jours. Je continuais à ranger tout en réfléchissant. Lorsque je m’installais à nouveau dans le canapé et reposais le portable sur mes genoux, ce fut pour ouvrir mon tableau de bord blogger – j’y possédais déjà un vieux blog – et cliquer sur créer. Le nom n’était pas encore tout à fait établi dans ma tête et il me fallu plusieurs heures pour le déterminer : The Violet Girl était né, et moi, j’étais Liz, sa rédactrice.

3 commentaires:

  1. Bonjour!
    Joli ton premier article! Du coup tu as ta premiere membre de blog ;-)
    Interessée par lire les suites de cette aventure car on dirait ma vie mais à l'envers pour la position géographique. Je suis partie du sud pour Paris, pour trouver du boulot...
    Et meme en ayant du boulot, il manque toujours quelques chose... Les amis, la famille, le soleil... Du coup pour occuper mes journées, faire comme si quelqu'un attendait peut etre quelque chose de moi... j'ai créé un blog également.
    Au plaisir de lire tes prochaines articles ;-)
    Bonne année à toi et ton blog ;-)

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  2. Chouette départ! bonne continuation...

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  3. Hello !
    Très joli style d'écriture, juste ce qu'il faut de familier pour qu'on se sente proche mais pas trop pour que ça ne fasse pas " wesh, bien ou bien ? ";)
    Quelques petits clins d'oeil à la blogo bien placés aussi, vivement la suite ;)

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